Actu-tendance n° 664

Jurisprudence – Relations individuelles

Rappel : Le salaire est fixé librement par les parties au contrat de travail, sous réserve du respect de certaines règles légales et conventionnelles (notamment en matière de minima).
Le salaire constitue un élément du contrat de travail du salarié qui ne peut être modifié sans son accord (Cass. soc., 3 juillet 2001, n° 99-42.761).
Lorsque le contrat de travail du salarié mentionne un salaire net, l’employeur peut-il considérer qu’il s’agit d’une erreur et retenir qu’il s’agit du salaire brut ?

Cass. soc., 14 décembre 2022, n° 21-17.171

Dans cette affaire, un salarié a été engagé en février 2004, suivant deux CDD successifs, avant d’être embauché en CDI en 2005, en qualité d’agent d’entretien.

Les trois contrats de travail du salarié, libellés de façon identique s’agissant de la rémunération, mentionnaient que l’intéressé percevrait une rémunération nette de 1 653 €.

Il a été licencié le 26 décembre 2016 et a saisi la juridiction prud’homale, afin d’obtenir la condamnation de son employeur au paiement de rappel de salaires et d’indemnités au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail. Le salarié demandait des rappels de salaire au motif que l’employeur avait établi les payes sur une base de 1 653 € brut, alors que son contrat mentionnait un montant de salaire net.

La Cour d’appel a rejeté la demande de rappel de salaires aux motifs que :

  • une telle mention du salaire net est peu courante dans un contrat de travail ;
  • l’employeur n’a jamais versé au salarié, agent d’entretien, le salaire correspondant à la rémunération nette mentionnée dans le contrat de travail s’en tenant à la classification prévue par la convention collective.

Elle en a déduit que la mention du salaire net dans le contrat de travail constituait une erreur de plume, non créatrice de droit ; de sorte que la somme mensuelle de 1 653 € devait être considérée comme une somme brute mensuelle à verser au salarié.

La Cour de cassation n’est pas du même avis. Elle rappelle que la rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant, ni dans sa structure, sans son accord.

Elle retient que la Cour d’appel n’a pas statué à bon droit dès lors que les contrats de travail successifs stipulaient un salaire net de 1653 € et que le salarié n’avait pas accepté de manière claire et non équivoque une modification de la rémunération contractuelle.

Note : La Cour de cassation est fidèle à sa jurisprudence antérieure : toute modification affectant le salaire contractuel, constitue une modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié (Cass. soc., 3 mars 1998, n° 95-43.274).

Rappel : L’exercice du droit de grève ne peut en principe justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié. La jurisprudence a précisé que la faute lourde est la faute d’une particulière gravité supposant une intention de nuire de l’employeur. À défaut, le licenciement est nul (Cass. soc., 26 juin 2013, n° 11-27.413).
Il résulte de l’article L. 1235-4 du Code du travail que pour une liste limitative d’hypothèses de licenciement nul, le juge ordonne à l’employeur de rembourser aux organismes concernés tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour du licenciement au jour du jugement, dans la limite de 6 mois d’indemnités par salarié.
L’employeur doit il rembourser les indemnités de chômage perçues par le salarié lorsque le licenciement pour faute lourde d’un salarié gréviste a été déclaré nul par le juge ?

Cass. soc., 18 janvier 2023, n° 21-20.311

Dans cette affaire, suite à un mouvement de grève en juin 2017, un salarié a été licencié pour faute lourde à raison de faits commis au cours de cette grève.

En octobre 2017, il a saisi la juridiction prud’homale pour que son licenciement soit déclaré nul et aux fins d’obtenir diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Les juges du fond donnent raison au salarié et disent le licenciement nul, faute de caractérisation d’une intention de nuire à l’employeur.

L’employeur est en conséquence condamné au paiement de diverses sommes, ainsi qu’au remboursement des indemnités de chômage versées au salarié entre la date de licenciement et le jugement dans la limite de trois mois.

Il se pourvoit en cassation.

Il reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir tiré les conséquences de ses constatations en retenant l’absence d’intention de nuire malgré le caractère « particulièrement abject » des faits dont s’était rendu responsable le salarié et le fait que certains d’entre eux étaient de nature à revêtir une qualification pénale.

L’employeur conteste également sa condamnation à rembourser les indemnités de chômage, qu’il estime dépourvue de fondement textuel.

La Cour de cassation confirme la décision des juges du fond : le licenciement est bien nul et l’employeur est redevable du remboursement des indemnités de chômage.

Pour trancher le litige, la Cour de cassation statue au visa de l’article L. 1235-4 du Code du travail, qui prévoit le remboursement par l’employeur des allocations chômage en cas de licenciement nul et des articles L. 1132-2 et L. 1132-4 du Code du travail qui sont relatifs au principe de non-discrimination.

Elle retient que les dispositions relatives au remboursement par l’employeur des allocations chômage, sont applicables en cas de nullité du licenciement en raison de l’exercice normal du droit de grève. Elle conclut que dès lors que la Cour d’appel a retenu la nullité du licenciement, l’employeur doit rembourser à Pôle emploi les allocations de chômage versées au salarié entre la date du licenciement et le jugement.

Note : Cet arrêt est l’occasion de rappeler l’importance pour les employeurs d’être vigilant dans la mise à en œuvre du pouvoir disciplinaire à l’égard des salariés grévistes. Le fait d’exercer son droit de grève ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire et ne peut pas justifier un licenciement, sauf faute lourde imputable au salarié, laquelle est appréciée très strictement par les juridictions.

Rappel : Il résulte de l’article L. 1224-1 du Code du travail qu’en cas de transfert d’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise.
Néanmoins, en cas de transfert partiel, lorsqu’un salarié investi d’un mandat représentatif du personnel est concerné, le transfert doit être autorisé par l’inspection du travail qui s’assure que le salarié ne fait pas l’objet d’une mesure discriminatoire (c. trav. art. L. 2414-1). 
Quelle est la juridiction compétente pour se prononcer lorsque le salarié protégé invoque le caractère frauduleux du transfert, alors même que celui-ci a été autorisé par l’inspection du travail, de même que le licenciement intervenu par la suite  ?

Cass. soc., 23 novembre 2022, n° 21-11.776 

En l’espèce, deux salariés ont été employés par une société A. Les salariés étaient investis d’un mandat représentatif.

En juillet 2012, un accord de cession de fonds de commerce a été signé entre la société A et une société B. La société A avait sollicité l’autorisation de procéder au transfert des contrats de travail des salariés, lequel a été autorisé par l’inspecteur du travail en septembre 2012.

Par la suite, en janvier 2013, la société B, placée en liquidation judiciaire a procédé au licenciement pour motif économique des salariés, après autorisation de l’inspecteur du travail.

En septembre 2013, les salariés ont saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à :

  • dire que le transfert de leur contrat de travail a été frauduleusement mis en œuvre ;
  • dire les licenciements sans cause réelle et sérieuse ;
  • condamner la société A au paiement de dommages-intérêts à ce titre.

La société A a soulevé une exception d’incompétence de la juridiction prud’homale.

Deux problèmes se posaient ainsi devant les juges : la question de l’existence de la fraude au transfert, d’une part,  celle de la compétence du juge judiciaire d’autre part.

Sur l’existence de la fraude au transfert

Les salariés soutenaient que la cession et les transferts des contrats de travail avaient été effectués en fraude de leurs droits.

Les juges du fond ont retenu l’existence d’une fraude après avoir constaté :

  • la grande proximité entre la cession, le début d’activité de la société B et la demande d’ouverture d’une procédure collective, ce qui confirme l’inexistence de la possibilité de survie ;
  • que le transfert s’est fait sans la reprise des éléments incorporels nécessaires à l’exploitation de la nouvelle société B ;
  • que la société A souhaitait se séparer du service qui a fait l’objet du transfert depuis 2007 ;
  • que la liquidation judiciaire a été prononcée immédiatement, deux mois après l’immatriculation de la société B ;
  • que la déclaration de créance faite par la société B, montre son absence d’activité propre et suffisante pour disposer de perspectives d’avenir réalistes.

En défense, la société A soutenait que la cession n’était pas constitutive d’une fraude et qu’elle n’a commis aucune faute. 

La Cour de cassation approuve la Cour d’appel. Elle retient que pour la société A, dont le souhait était de se séparer du service français depuis 2007, le seul but de cette cession sans avenir était d’éluder les règles relatives au licenciement économique, de sorte que la cession et les transferts des contrats de travail avaient été effectués en fraude des droits des salariés.

Sur la compétence du juge judiciaire

La Cour d’appel a accueilli les demandes des salariés considérant qu’en présence d’une suspicion de fraude, le juge judiciaire retrouve sa compétence pour statuer sur la légalité d’un transfert, même si l’autorité administrative, qui avait donné son autorisation au licenciement du salarié, avait à cette occasion, déjà constaté que les conditions du transfert étaient réunies.

La société A a formé un pourvoi en cassation. Selon elle, l’autorisation de transfert d’un salarié protégé liait le juge judiciaire notamment sur la question de la réunion des conditions du transfert. Elle considérait que la Cour d’appel avait statué en violation du principe de la séparation des pouvoirs en se déclarant compétente dans cette hypothèse.

La Cour de cassation ne fait pas droit à sa demande. Elle considère que la demande des salariés en l’espèce ne concerne pas le bien-fondé de la décision administrative qui a autorisé le transfert. Elle conclut que « le salarié protégé, dont le transfert du contrat de travail a été autorisé par l’inspecteur du travail peut invoquer devant le juge judiciaire, eu égard aux circonstances dans lesquelles est intervenu le transfert, l’existence d’une fraude et solliciter des dommages-intérêts, sans que cette contestation, porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ».

Note : La Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence antérieure sur les conséquences de la fraude en cas de transfert de contrats de travail.

Rappel : Les entreprises de moins de 1 000 salariés (ou celles en redressement ou liquidation judiciaire quelle que soit leur taille), ont l’obligation de proposer aux salariés dont le licenciement économique est envisagé, un contrat de sécurisation professionnelle (CSP), dont l’objectif est l’organisation et le déroulement d’un parcours de retour à l’emploi pour le salarié (C. trav. art. L. 1233-65).
Chaque salarié doit être informé individuellement et par écrit du contenu du contrat de sécurisation professionnelle et de la possibilité qu’il a d’en bénéficier. 
Le salarié dispose de 21 jours pour accepter ou refuser le contrat de sécurisation professionnelle. L’adhésion du salarié au CSP emporte rupture du contrat de travail d’un commun accord (C. trav. art. L. 1233-67).
A quel moment de la procédure le salarié doit-il être informé du motif économique de la rupture à l’origine de la proposition de CSP ?

Cass. soc., 23 novembre 2022, n° 21-19.349 

Une salariée a été convoquée en octobre 2015 à un entretien préalable en vue d’un licenciement pour motif économique.

Au cours de l’entretien qui a eu lieu le 29 octobre 2015, un CSP lui a été proposé. Le 6 novembre 2015, elle a adressé à son employeur le bulletin d’acceptation du CSP.

Le délai de réflexion de 21 jours pour l’adhésion au CSP n’étant pas encore expiré, l’employeur lui a notifié le 9 novembre 2015 les motifs économiques de la rupture. Ce courrier précisait qu’en cas de refus du contrat de sécurisation professionnelle, cette lettre constituerait la notification de son licenciement.

Contestant les motifs de la rupture de son contrat de travail, la salariée a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.

La salariée soutenait que l’employeur doit énoncer le motif économique de la rupture:

  • soit dans le document écrit d’information sur le CSP remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement.
  • soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement.
  • soit encore, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

La Cour d’appel a débouté la salariée au motif que l’information relative à la cause économique de la rupture avait été donnée à la salariée tant lors de l’entretien préalable que dans la lettre de licenciement notifiée le 9 novembre, soit antérieurement à son adhésion complète au contrat de sécurisation professionnelle intervenue le 18 novembre 2015.

La salariée s’est pourvu en cassation. Elle reprochait notamment à la cour d’appel d’avoir tenu compte, « pour se déterminer sur l’antériorité de l’information de l’employeur quant au motif économique du licenciement, de la date à laquelle le dossier complet d’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle avait été envoyé, soit le 18 novembre 2015, et non pas de la date d’envoi à l’employeur du bulletin d’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ».

La Cour de cassation donne raison à la salariée. Elle rappelle que l’employeur est tenu d’énoncer la cause économique de la rupture du contrat par écrit :

  • soit dans le document écrit d’information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement,
  • soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail,
  • soit encore, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

La Cour de cassation précise que l’adhésion du salarié au dispositif du CSP s’apprécie à la date d’envoi du bulletin d’acceptation par le salarié, quand bien même l’adhésion « complète » serait intervenue postérieurement. La salariée avait ici envoyé ce document le 6 novembre 2015, donc avant la communication écrite du motif économique, ce qui rendait la rupture sans cause réelle et sérieuse.

Note : Il s’agit d’un nouvel exemple illustrant la jurisprudence constante de la Cour de cassation en la matière qui impose à l’employeur de notifier par écrit au salarié le motif économique à l’origine de la rupture du contrat de travail (Cass. Soc., 22 septembre 2015, n° 14-16.218).

Il est vivement recommandé aux employeurs de remettre au salarié en main propre contre signature, le document d’information indiquant le motif économique de la rupture du contrat de travail lors de l’entretien préalable.

Rappel : La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dans la survenance d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle permet à la victime d’obtenir :
  • d’une part, un complément d’indemnisation forfaitaire par le biais d’une majoration de la rente d’incapacité permanente qui lui est allouée ; 
  • d’autre part, devant les juridictions de sécurité sociale, la réparation intégrale des préjudices subis et non réparés par la majoration, selon les règles de responsabilité civile de droit commun. La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur.
Le code de la sécurité sociale (CSS, art. L. 452-3) reconnaît à la victime le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation :
  • du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées ;
  • de ses préjudices esthétiques et d’agrément ;
  • ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Ce droit s’étend, en cas de décès, au préjudice moral subi par les ayants droit.
Pendant longtemps, les tribunaux ont considéré que l’énumération susvisée des préjudices pouvant être réparés était limitative. Puis, à compter de 2012, la Cour de cassation reconnaît le droit à une réparation de l’ensemble des préjudices (Cass. 2e civ., 4 avr. 2012, n° 11-15.393).
La victime peut ainsi obtenir la réparation de ses préjudices pour autant que les juges ne considèrent qu’ils ne sont pas déjà couverts par la majoration de la rente d’incapacité permanente.
Or, la Cour de cassation considérait jusqu’à présent que la rente majorée réparait, entre autres préjudices, la perte de gains professionnels, l’incidence professionnelle de l’incapacité et le déficit fonctionnel permanent (Cass. 2e civ., 11 juin 2009, n°08-17.581).
La Cour de cassation revient sur cette position dans deux arrêts du 20 janvier 2023.

Cass. ass. plén., 20 janvier 2023, n° 20-23.673
Cass. ass. plén., 20 janvier 2023, n° 21-23.947

Dans cette affaire, deux salariés sont morts d’un cancer des poumons après avoir inhalé des poussières d’amiante dans le cadre de leur activité professionnelle.

Les ayants droit ont saisi la juridiction de sécurité sociale afin de faire reconnaitre la faute inexcusable de l’employeur et d’obtenir une indemnisation complémentaire au titre des souffrances physiques et morales endurées par la victime.

La Cour d’appel a reconnu l’existence de la faute inexcusable de l’employeur dans les deux affaires. Pour autant, la réparation accordée par les juges dans ces affaires diffère.

Dans la première affaire (Cass. ass. plén., 20 janvier 2023, n° 20-23.673),  la Cour d’appel suit la jurisprudence jusqu’alors en vigueur et estime que les préjudices dont il est demandé indemnisation sont d’ores et déjà couverts par la majoration de la rente.

Dans la seconde affaire (Cass. ass. plén., 20 janvier 2023, n° 21-23.947), la Cour d’appel accorde aux demandeurs une indemnisation spécifique des souffrances physiques et morales subies par la victime, en plus de la majoration de la rente.

La Cour de cassation casse le premier arrêt d’appel et rejette le pourvoi formé contre le second arrêt.

La Cour retient que désormais la rente prévue à l’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale ne répare pas le déficit fonctionnel permanent.

Pour expliquer cette solution, la Cour de cassation précise que :

  • la jurisprudence selon laquelle la victime percevant une rente ne peut obtenir une réparation distincte des souffrances physiques et morales qu’à la condition qu’il soit démontré que celles-ci n’ont pas été indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent, est difficilement conciliable avec le caractère forfaitaire de la rente au regard du mode de calcul de celle-ci ;
  • les victimes d’AT/MP éprouvent parfois des difficultés à administrer la preuve de ce que la rente n’indemnise pas le poste de préjudice personnel du déficit fonctionnel permanent ;
  • le Conseil d’Etat juge de façon constante que la rente d’accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle et non un préjudice personnel.

La Cour de cassation opère ainsi un revirement de jurisprudence au regard de tous ces éléments.

Note : Il convient de retenir de cet arrêt qu’un en cas d’AT/MP, la victime qui obtient la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur peut demander une indemnisation complémentaire au titre des souffrances physiques et morales endurées après consolidation de son état. Il n’est plus nécessaire de démontrer que ces souffrances n’ont pas déjà été indemnisées par la rente.

Législation et réglementation

La déclaration d’un accident du travail incombe en principe à l’employeur (CSS. art. R. 441-1). Cette déclaration peut se faire en ligne ou par tout moyen conférant une date certaine à sa réception.

La déclaration peut être assortie de réserves motivées de la part de l’employeur si ce dernier estime que les circonstances de l’accident sont contestables (CSS. art. R. 441-6). Il dispose d’un délai de 10 jours pour émettre, par tout moyen conférant date certaine à leur réception, des réserves motivées auprès de la caisse primaire d’assurance maladie.

Dans une actualité publiée le 18 janvier 2023, le site net-entreprises.fr précise que les employeurs peuvent désormais émettre leurs réserves directement en ligne en les ajoutant aux déclarations d’accident du travail en ligne.

Ces réserves seront ensuite transmises directement à la caisse primaire d’assurance maladie du salarié pour traitement.

Pour rappel, un contrat de sous-traitance est un contrat au titre duquel un donneur d’ordre confie à un sous-traitant, l’exécution de tout ou partie d’une prestation. 

Le Code du travail met à la charge des donneurs d’ordre, une obligation de vigilance afin de lutter contre le travail dissimulé.

Ainsi, le donneur d’ordre qui conclut un contrat dont l’objet porte sur une obligation d’un montant au moins égal à 5.000 € HT en vue de l’exécution d’un travail, de la fourniture d’une prestation de services ou de l’accomplissement d’un acte de commerce, doit s’assurer que son cocontractant s’acquitte de certaines obligations sociales et fiscales déclaratives (C. trav. art. L. 8222-1 et D. 8222-5).

Le donneur d’ordre qui méconnait cette obligation de vigilance est tenu solidairement avec son sous-traitant de payer ses sanctions, y compris les annulations d’exonérations et de réductions de cotisations sociales.

Dans un souci de renforcer la lutte contre les fraudes, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit la possibilité de moduler la pénalité destinée au donneur d’ordre, en intégrant un élément de gravité dans la méconnaissance de son obligation de vigilance.

Ainsi, il est désormais prévu que :

  • dans l’hypothèse d’un premier manquement, la pénalité encourue par le donneur d’ordre est plafonnée à 15 000 € pour une personne physique et à 75 000 € pour une personne morale ;
  • en cas de récidive, la limitation ne s’appliquera plus. La sanction serait strictement proportionnée au montant mis à sa charge au titre de la solidarité financière (CSS, art. L. 133-4-5).

En outre, en cas de constat de travail dissimulé, une majoration de 25 % ou de 40 % s’appliquera au montant du redressement.

Si le donneur d’ordre procède au règlement intégral des cotisations, pénalités et majorations de retard dans les 30 jours suivant leur notification, il pourra bénéficier d’une réduction des majorations de 10 points.

L’article L. 436-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) met à la charge de l’employeur qui embauche un travailleur étranger (ou qui accueille un salarié détaché) une taxe payable une fois, dont le montant varie en fonction de la durée du contrat :

  • lorsque l’embauche intervient pour une durée supérieure ou égale à 12 mois, la taxe est égale à 55 % du salaire brut mensuel versé à ce travailleur étranger, dans la limite de 2,5 fois le salaire minimum de croissance brut mensuel ;
  • lorsque l’embauche intervient pour un emploi temporaire d’une durée supérieure à 3 mois et inférieure à 12 mois, le montant de la taxe, varie selon le niveau du salaire dans des limites comprises entre 50 € et 300 €.

Jusqu’ici, cette taxe était gérée par l’Office Français de l’immigration et de l’intégration (OFII).

L’article 80 de la loi de finance pour 2023 (L. n° 2022-1726, 30 décembre 2022, JO 31 déc.) acte le transfert de la gestion et du recouvrement de la taxe à la Direction générale des Finances publiques (DGFiP).

En outre, les modalités déclaratives et de paiement de la taxe évoluent. Ainsi :

  • la taxe est exigible à la fin du mois au cours duquel intervient le premier jour d’activité professionnelle en France du travailleur étranger ou du salarié détaché ;
  • la taxe est déclarée, liquidée et acquittée par le redevable à des dates déterminées par arrêté du ministre chargé du budget. La périodicité des déclarations et paiements est au plus mensuelle et au moins annuelle ;
  • la taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires.

Ces dispositions sont applicables aux impositions dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2023.

L’employeur peut verser au télétravailleur qui engage des frais une allocation forfaitaire.

Pour l’année 2023, l’Urssaf précise les limites dans lesquelles l’allocation forfaitaire versée par l’employeur sera réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales.

Ainsi, le montant de l’allocation forfaitaire de télétravail dont le montant varie en fonction du nombre de jours télétravaillés, est exonéré dans les limites suivantes :

  • En cas d’allocation mensuelle : 10,40 € par mois pour une journée en télétravail par semaine  ; 20, 80 € par mois, pour un salarié effectuant deux journées de télétravail par semaine
  • En cas d’allocation fixée par jour : 2,60 € par jour télétravaillé, dans la limite de 57,20 € par mois.

Ces nouveaux montants sont en vigueur depuis le 1er janvier 2023.

Si l’allocation forfaitaire est prévue par la convention collective de branche, l’accord professionnel ou interprofessionnel ou un accord de groupe, elle est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et contributions sociales dans la limite des montants prévus par accord collectif, dès lors que l’allocation est attribuée en fonction du nombre de jours effectivement télétravaillés et que son montant n’excède pas 13 € par mois pour une journée de télétravail par semaine, ou 3,25 € par jour de télétravail dans le mois, dans la limite mensuelle de 71,50 € (BOSS, Frais professionnels, § 1810).

En cas de remboursement dépassant ces limites, l’exonération de cotisations et contributions sociales ne pourra être admise que sur la base des justificatifs produits à l’occasion des contrôles.