Actu-tendance n° 639

Jurisprudence – Relations individuelles

Rappel : Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement (personnel ou économique) peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié (art. L. 1235-2 du Code du travail).
Dans les 15 jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
L’employeur dispose d’un délai de 15 jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié dans les mêmes formes.
Dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement et toujours selon les mêmes formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement (art. R. 1232-13 et R. 1233-2-2 du Code du travail).
A défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande de précisions, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire (art. L. 1235-2 du Code du travail).
L’employeur est-il tenu de mentionner dans la lettre de licenciement la possibilité pour le salarié de demander des précisions sur les motifs de la rupture ?

Cass. soc., 29 juin 2022, n° 20-22.220

A la suite de son licenciement pour faute grave, une salariée a saisi la justice pour en  contester le bien-fondé estimant notamment que la lettre de licenciement n’était pas suffisamment motivée.

La Cour d’appel l’a déboutée de ses demandes après avoir constaté que la lettre de licenciement énonçait « un grief tiré d’un comportement et de propos déplacés de la salariée à l’égard de 4 collaborateurs de nature à mettre en péril leur santé psychique et à dégrader leurs conditions de travail », de sorte que le motif de licenciement était précis et matériellement vérifiable.

La Cour d’appel en a déduit que la lettre de licenciement répondait à l’exigence légale de motivation.

La salariée se pourvoit en cassation reprochant à son employeur de ne pas avoir précisé dans la lettre de licenciement :

  • ni la possibilité pour la salariée de demander à l’employeur d’apporter des précisions sur les motifs de la rupture ;
  • ni le nom des salariés imputant à la salariée des faits de harcèlement moral, ni la date de ces faits, ni la durée de ces prétendus agissements.

La Cour de cassation ne suit pas les arguments de la salariée et confirme la décision d’appel sur le fondement des articles L. 1235-2 et R. 1232-13 du Code du travail précités.

La Cour de cassation ajoute « qu’aucune disposition n’impose à l’employeur d’informer le salarié de son droit de demander que les motifs de la lettre de licenciement soient précisés ».

Note : L’employeur n’a pas l’obligation de préciser, dans la lettre de licenciement, que le salarié dispose de la possibilité dans un délai de 15 jours de solliciter auprès de son employeur des précisions sur le motif de son licenciement.

Cet arrêt concerne un licenciement pour motif personnel. Compte tenu des termes généraux employés dans l’arrêt, cette solution est selon nous transposable à d’autres motifs (ex. : licenciement pour motif économique).

Rappel : La jurisprudence admet la possibilité pour le salarié de saisir le conseil des prud’hommes (CPH) afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur lorsque celui-ci n’exécute pas ses obligations contractuelles.
Si le juge prononce la résiliation du contrat, le contrat de travail est rompu à la date du prononcé de la décision judiciaire, dès lors que le salarié est toujours au service de son employeur à cette date et que le contrat de travail n’a pas été rompu (Cass. soc., 21 septembre 2016, n° 14-30.056).
Lorsque le contrat a été rompu avant le jugement, la date d’effet de la résiliation judiciaire remonte à la date de la rupture du contrat de travail (Cass. soc., 15 mai 2007, n° 04-43.663).
Lorsque le salarié est placé en arrêt de travail pour maladie jusqu’au terme de son CDD, quelle est la date à retenir pour la rupture du contrat de travail ?

Cass. Soc., 22 juin 2022, n° 20-21.411

Dans cette affaire, un salarié est engagé pour 5 mois sous contrat à durée déterminée (CDD) à compter du 23 avril 2018.

A la suite d’une altercation survenue le 21 mai 2018 l’ayant opposé au dirigeant de la société, le salarié est placé en arrêt de travail jusqu’au terme de son contrat.

Le 8 juin 2018, il saisit la juridiction prud’homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur et le paiement de diverses indemnités.

La Cour d’appel fait droit à sa demande après avoir constaté que le salarié avait subi une atteinte physique de la part de son employeur. Un certificat médical, un compte-rendu de passage aux urgences et un arrêt de travail, datés du 21 mai 2018, viennent le confirmer.

Pour les juges, commet un manquement grave à ses obligations l’employeur qui porte une atteinte physique ou morale à son salarié. Cette faute grave rend alors impossible le maintien de la relation contractuelle.

La Cour prononce la rupture anticipée du contrat de travail aux torts de l’employeur, à la date du 21 mai 2018 (date des faits invoqués à l’appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat).

Contestant cette décision, l’employeur se pourvoit en cassation. Il reproche à la Cour d’appel d’avoir prononcé la rupture anticipée du CDD à la date du 21 mai 2018, sans avoir constaté à cette date que le contrat avait été rompu par le salarié ou l’employeur et que le salarié n’était plus à la disposition de l’employeur.

La Cour de cassation suit l’argumentation de l’employeur et censure la décision d’appel en rappelant « qu’en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce, dès lors que le contrat n’a pas été rompu avant cette date et que le salarié est toujours au service de l’employeur ». 

En l’espèce, à la date du 21 mai 2018, le contrat de travail du salarié n’était pas rompu. Le salarié était placé en arrêt de travail pour maladie. Il était donc toujours au service de son employeur.

Note : Il s’agit d’une confirmation de jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. soc., 21 septembre 2016, n° 14-30.056). Dans cet arrêt, les juges avaient considéré que le salarié n’était plus à la disposition de l’employeur depuis la date de commencement de son nouvel emploi.

Rappel : En vertu de l’article L. 1232-6 du Code du travail, il revient à l’employeur de notifier le licenciement au salarié.
Le licenciement prononcé par une personne non habilitée à le faire est dénué de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 26 avril 2006, n° 04-42.860).
Un salarié peut-il être licencié par le gérant de la société B alors qu’il avait été embauché par ce même gérant pour le compte de la société A ?

Cass. Soc., 15 juin 2022, n° 21-11.466

Dans cette affaire, un salarié a été engagé par la société A à compter du 10 juin 2013.

Il a été licencié pour faute grave le 29 mars 2017 par la société B.

En l’espèce, ces deux sociétés avaient le même gérant.

Le salarié a saisi le CPH pour contester son licenciement, estimant que la personne qui l’avait licencié n’était pas son employeur.

Pour sa défense, la société faisait valoir que la convocation à l’entretien préalable et la lettre de licenciement avaient été signées par le gérant unique des 2 sociétés, lui-même signataire du contrat de travail du salarié. Il aurait donc dû être considéré comme « un représentant habilité de l’employeur réel du salarié ».

Selon la Cour d’appel, le fait que le signataire de la lettre de licenciement soit le gérant des 2 sociétés est inopérant. Pour les juges, le salarié n’avait pas été licencié par son employeur.

La Cour de cassation confirme cette décision.

En l’espèce, les juges ont constaté que la procédure de licenciement avait été engagée par la société B et que la lettre de licenciement avait été établie par cette société et signée par son gérant, de sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

Note : Il est de principe que l’employeur ne peut donner mandat à une personne étrangère à l’entreprise pour notifier le licenciement.

Dans cet arrêt, le gérant est le même dans les 2 sociétés. Pourtant, cet argument n’a pas été retenu par les juges. Seul l’employeur du salarié doit convoquer et signer la lettre de licenciement, autrement dit le gérant en tant qu’employeur de la société A et non de la société B.

En pratique, l’employeur donne souvent mandat à une personne de l’entreprise pour procéder aux licenciements (exemple le service RH). Cette personne doit disposer d’une délégation de pouvoirs écrite et signée de la part de l’employeur.

Rappel : Le salarié dispose d’une liberté d’expression au sein et hors de l’entreprise, sauf abus (Cass. soc., 29 novembre 2006, n° 04-48.012).
L’abus est notamment caractérisé lorsque les termes utilisés par le salarié sont injurieux, diffamatoires ou excessifs.
Le fait pour une salariée de dénigrer son employeur en prétendant en privé qu’il a critiqué l’un de ses collègues constitue-t-il un abus de liberté d’expression justifiant son licenciement ?

Cass. Soc., 15 juin 2022, n° 21-10.572

Une salariée, employée comme secrétaire par une société de carrosserie, est licenciée pour faute grave.

Son employeur lui reproche de l’avoir dénigré en abusant de sa liberté d’expression.

A l’occasion d’un événement privé, la salariée aurait rapporté à un collègue, en présence de 2 de ses amis, que les employeurs tiendraient à son égard des propos blessants et humiliants concernant ses qualités professionnelles selon lesquels ce collègue serait « le plus mauvais peintre qu’ils avaient pu avoir dans l’entreprise ».

Saisie du litige, la Cour retient la cause réelle et sérieuse de la rupture estimant que la salariée avait abusé de sa liberté d’expression et manqué à son obligation de loyauté.

La salariée forme un pourvoi en cassation, reprochant à la Cour d’appel d’avoir retenu un manquement à l’obligation de loyauté alors que les faits reprochés se sont déroulés en dehors du temps et du lieu de travail.

La Cour de cassation rejette cet argument et confirme l’arrêt d’appel, en retenant : « il était établi que, contrairement à ce qu’elle soutenait, la salariée avait bien affirmé à l’un de ses collègues, en présence de deux de ses amis, que leurs employeurs tenaient à son égard des propos, blessants et humiliants ».

Or, il ressort des faits « que les employeurs contestaient avoir tenu de tels propos », et que « la salariée ne soutenait pas qu’ils l’avaient réellement fait ».

Cette affirmation publique selon laquelle l’employeur aurait tenu des propos insultants constituait pour les juges un dénigrement de ce dernier, caractérisant un abus de la liberté d’expression et ce même si les propos ont été tenus en dehors du temps et du lieu de travail.

Les juges en ont déduit que les agissements « caractérisaient un manquement de la salariée à son obligation de loyauté découlant de son contrat de travail », et ont décidé que ce comportement « constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement ».

Note : L’abus dans l’exercice de la liberté d’expression s’apprécie notamment au regard de la teneur des propos, de leur degré de diffusion (publique ou privée), des fonctions exercées par l’intéressé, ou encore des répercussions sur l’entreprise.

Dans le cas présent, les propos prêtés par une salariée à la direction avaient créé un malaise dans l’entreprise entre la direction et le salarié prétendument dénigré par elle.

Jurisprudence – Relations collectives

Rappel : Le comité social et économique d’établissement (CSE-E) a les mêmes attributions que le comité social et économique d’entreprise (CSE), dans la limite des pouvoirs confiés au chef de cet établissement.
Le CSE-E est consulté sur les mesures d’adaptation des décisions arrêtées au niveau de l’entreprise spécifiques à l’établissement et qui relèvent de la compétence du chef de cet établissement (art. L. 2316-20 du Code du travail).
Le CSE est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (art. L. 2312-8 4° du Code du travail).
Le comité social et économique central d’entreprise (CSE-C) exerce les attributions qui concernent la marche générale de l’entreprise et qui excèdent les limites des pouvoirs des chefs d’établissement. Il est seul consulté notamment sur les projets décidés au niveau de l’entreprise qui ne comportent pas de mesures d’adaptation spécifiques à un ou plusieurs établissements (art. L. 2316-1 du même code).
Un CSE-E doit-il être consulté sur le plan de reprise d’activité établit au niveau de l’établissement qui reprend le plan de reprise établit au niveau de la société ?

Cass. Soc., 29 juin 2022, n° 21-11.935

Dans cette affaire, une société composée de plusieurs établissements distincts élabore un plan de reprise d’activité fixant les modalités de la sortie progressive du confinement à compter du 11 mai 2020.

Ce plan est présenté pour consultation au CSE central le 4 mai.

La direction régionale de l’un des établissements élabore et transmet aux membres de son CSE-E notamment le plan de reprise de l’activité de l’établissement.

Le CSE-E saisit la justice pour qu’il soit enjoint à la société d’engager auprès de ce comité local la procédure d’information et de consultation sur ce plan de reprise.

Le comité estime que le plan de reprise d’activité élaboré par la direction régionale doit faire l’objet d’une consultation au niveau de l’établissement dans la mesure où il s’agit:

  • D’une mesure d’adaptation spécifique du cadrage national relevant de la compétence du chef d’établissement ;
  • D’un aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés.

La Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, rejette la demande des élus sur le fondement des articles L. 2316-20, L. 2312-8 et L. 2316-1 du Code du travail précités.

En l’espèce, les juges ont relevé que le plan de reprise d’activité de la société prévoyait :

  • concernant le « volet sanitaire », des règles applicables en matière de santé et de sécurité communes et homogènes au sein de la société (déplacement, transport, prise en charge des personnes contacts, salariés sur site et à distance, seuls ou en équipe ou en cas de co-activité) ;
  • concernant les ressources humaines, un retour progressif des équipes à partir du 11 mai sur une période de 4 à 6 semaines, avec comme objectif, le « retour physique de la moitié du collectif de travail d’ici le mois de juillet à adapter selon les contraintes d’environnement » ;
  • l’énonciation du principe d’un rythme de reprise adapté avec la prise en compte du contexte local de chaque direction ;
  • pour la dimension métier, la définition d’un « cadre de cohérence national » avec la nécessité de prioriser les activités par grands métiers.

De son côté, le plan de reprise de l’établissement précisait notamment qu’il déclinait sans subsidiarité le projet de reprise d’activité de la société.

La Haute juridiction ajoute « qu’aucun élément ne permet d’établir que le chef d’établissement disposait d’une quelconque marge de manœuvre dans l’exercice de son pouvoir de décision quant aux modalités de la reprise de l’activité au sein de son établissement telles qu’elles avaient été arrêtées au niveau de l’entreprise ».

En l’espèce, les juges en ont conclu que le plan de reprise d’activité de la direction régionale de l’établissement ne constituait pas une mesure d’adaptation spécifique à cet établissement du plan de reprise d’activité de la société.

Il en résulte que le CSE-E n’avait donc pas à être consulté.

Note : La Cour de cassation rappelle ici les règles applicables en matière de répartition et d’articulation des consultations entre le CSE-C et les CSE-E, qui font l’objet d’une appréciation au cas par cas.

Cet arrêt donne l’occasion aux juges de préciser que dans le cadre d’un projet ponctuel, le CSE-E n’est pas consulté lorsque le chef d’établissement se contente d’appliquer le projet mis en place au niveau de l’entreprise et qu’il ne dispose pas d’une marge de manœuvre dans sa mise en œuvre.

Rappel :  Aux termes de l’article L. 1235-7-1 du Code du travail, toute contestation portant sur l’accord collectif ou le document unilatéral élaboré par l’employeur, sur le contenu du PSE, ou sur la régularité de la procédure d’information-consultation des représentants du personnel, ne peut faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation de l’administration. Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.
S’agissant du PSE, le législateur a donc instauré un bloc de compétence au profit du juge administratif.
Toutefois, certains contentieux portant sur les aspects individuels du licenciement restent de la compétence du juge prud’homal. Il en est ainsi notamment du motif économique du licenciement, de l’application des critères relatifs à l’ordre des licenciements, de l’application des mesures prévues par le PSE au niveau individuel.
Quel est l’étendu du contrôle de l’administration en matière de reclassement dans le cadre de l’homologation du document unilatéral portant PSE ?

Conseil d’État, 20 juin 2022, n° 437767

Le CSE d’une UES et plusieurs syndicats saisissent le juge administratif pour faire annuler la décision d’homologation du document unilatéral fixant le contenu du PSE.

La Cour administrative d’appel rejette leur demande. Ils forment alors un pourvoi en cassation en invoquant notamment l’insuffisance du PSE.

En l’espèce, dans ce document unilatéral, le volet relatif au reclassement des salariés comportait notamment :

  • une liste de postes de reclassement disponibles au sein de la société et au sein du groupe auquel elle appartient ;
  • des précisions sur les postes disponibles ;
  • des garanties quant au calendrier de transmission aux salariés de propositions de reclassement indiquant qu’une offre d’emploi personnalisée sera faite aux salariés concernés par écrit à compter d’une date déterminée ;
  • des mesures d’accompagnement au reclassement externe.

Ils reprochaient le fait que, dans le PSE, il n’était fait état de la diffusion que d’une seule offre personnalisée de reclassement aux salariés, et que la liste des postes de reclassement ne précisait pas les critères de départage en cas de candidatures multiples sur un même poste.

Le Conseil d’État rejette le pourvoi, en rappelant en premier lieu ce que doit être le contrôle de l’administration au stade de l’homologation du document unilatéral portant sur le PSE.

La Haute juridiction rappelle que l’autorité administrative doit contrôler le caractère suffisant du plan.

Il revient à l’administration « de s’assurer qu’en application des articles L. 1233-61 et suivants du Code du travail, le plan de reclassement intégré au PSE est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité ».

Elle doit ensuite vérifier « que l’employeur a identifié dans le plan l’ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l’entreprise ». Lorsque l’entreprise appartient à un groupe, elle doit s’assurer « que l’employeur, seul débiteur de l’obligation de reclassement, a procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement sur le territoire national dans les autres entreprises du groupe, quelle que soit la durée des contrats susceptibles d’être proposés pour pourvoir à ces postes, en indiquant dans le plan, pour l’ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, leur nombre, leur nature et leur localisation ».

Le Conseil d’État précise ensuite ce qui ne relève pas du contrôle de l’administration à ce stade de la procédure.

Au stade de l’homologation du document portant sur le PSE, l’autorité administrative n’a pas à contrôler le respect par l’employeur de l’obligation de recherche sérieuse des possibilités de reclassement des salariés.

Il n’appartient pas à l’administration de contrôler « le respect de l’obligation qui, en application de l’article L. 1233-4 du code du travail, incombe à l’employeur qui projette de licencier un salarié pour motif économique, consistant à procéder, préalablement à son licenciement, à une recherche sérieuse des postes disponibles pour le reclassement de ce salarié, qu’ils soient ou non prévus au PSE, en vue d’éviter autant que de possible ce licenciement. Il en va ainsi même lorsque le document unilatéral arrêtant le PSE comporte des garanties relatives à la mise en œuvre de l’obligation, prévue à l’article L. 1233-4 du code du travail, de recherche sérieuse de reclassement individuel. Au demeurant, de telles garanties, dont les salariés pourront, le cas échéant, se prévaloir, pour contester leur licenciement, ne sont pas de nature à dispenser l’employeur de respecter, dans toute son étendue, l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article L. 1233-4 du code du travail ».

Le Conseil d’Etat considère ainsi, qu’en l’espèce, les mentions portant sur le volet du reclassement étaient suffisantes.

Ainsi, n’empêche pas l’homologation du PSE, le fait que :

  • « le plan de reclassement ne mentionne dans ses développements consacrés aux éléments de calendrier la diffusion aux salariés que d’une seule offre de reclassement » ;
  • « la liste de postes de reclassement annexée à ce plan ne prévoie pas de critères de départage en cas de candidatures multiples sur un même poste ».

Autrement dit, lorsque le PSE est prévu par un document unilatéral, il appartient à l’administration, au stade de l’élaboration du document unilatéral, d’apprécier si le plan de reclassement est suffisant au regard des moyens de l’entreprise et du groupe auquel elle appartient. En revanche, il ne lui incombe pas de contrôler le respect par l’employeur de son obligation de recherche sérieuse des possibilités de reclassement des salariés, y compris lorsque des garanties relatives à cette obligation figurent dans le PSE.

Note : La décision du Conseil d’Etat distingue bien deux phases dans la procédure :

  • Celle de l’homologation du document portant sur le PSE (avant le déploiement du PSE) : pour laquelle l’administration n’a pas à apprécier ni à contrôler le respect des dispositions tenant à la mise en œuvre des recherches de reclassement interne, en application de l’article L. 1233-4 du Code du travail ;
  • Celle de la notification des licenciements (déploiement du PSE) : pour laquelle il incombe à l’employeur de remplir ses obligations en matière de recherche sérieuse de reclassement.

Si au regard de cet arrêt, les conditions de mise en œuvre des recherches sérieuses de reclassement interne ne seront pas contrôlées par l’administration pour homologuer le Plan, elles pourront le cas échéant être contrôlées par le juge judiciaire en cas de contentieux portant sur les licenciements économiques intervenus en application du PSE.