Actu-tendance n° 613

Jurisprudence – Relations individuelles

Rappel : Le salarié jouit, dans l’entreprise et hors de celle-ci, de sa liberté d’expression, sous réserve de l’abus, lequel est caractérisé lorsque les termes utilisés par le salarié sont injurieux, diffamatoires ou excessifs (Cass. Soc., 14 décembre 1999, n° 97-41.995).
L’abus par le salarié de sa liberté d’expression est passible de sanction disciplinaire. Il constitue généralement une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. Soc., 4 février 1997, n° 96-40.678), voire une faute grave, comme dans la décision rendue ci-dessous.
Le fait de qualifier un salarié de « lèche-cul » constitue-t-il un abus de la liberté d’expression ?

Cass. Soc., 8 décembre 2021, n° 20-15.798

Lors d’une réunion de direction, un salarié, adjoint de direction informatique, demande à une salariée de nationalité italienne : « Comment dit-on lèche-cul en italien ? ». Il répond ensuite lui-même à cette question en indiquant le nom de la salariée concernée : « Et bien ça se dit [nom de la salariée] ». A la suite de ces évènements, le salarié est licencié pour faute grave. Il conteste son licenciement, soutenant notamment que ses propos relevaient de sa liberté d’expression et que leur tonalité humoristique les privait de tout caractère injurieux, diffamatoire ou excessif.

La cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, rejette la demande du salarié. Elle retient que les propos tenus par ce dernier, considérés comme « injurieux et offensants à l’égard d’une salariée », constituaient « un abus de sa liberté d’expression rendant à eux seuls impossible son maintien dans l’entreprise ».

Il est à noter que cette affaire s’inscrivait dans un contexte social extrêmement tendu, les faits ayant été révélés à l’issue d’une enquête menée en lien avec le CHSCT, laquelle enquête avait également mis en évidence d’autres manquements de la part du salarié, invoqué dans la lettre de licenciement mais non repris par la Chambre sociale.

Note : La Cour de cassation donne ici une nouvelle illustration de faits ne relevant pas de l’exercice normal de la liberté d’expression.

En pratique, l’abus de la liberté d’expression s’apprécie notamment au regard de la teneur des propos, de leur degré de diffusion, des fonctions exercées par l’intéressé et de l’activité de l’entreprise.

Rappel : Un fait imputé au salarié ne peut pas constituer une faute s’il relève de la vie personnelle de l’intéressé (Cass. Soc., 26 septembre 2001, n° 99-43.636).
Les propos sexistes et homophobes tenus par un manager à propos de collègues de travail dans un groupe de discussion sur le réseau social Snapchat relèvent-ils de la sphère privée ?

CPH Grenoble, 3 décembre 2021, n° 19/00756

Un salarié occupant des fonctions de manager est licencié pour faute grave. Il lui est notamment reproché d’avoir publié des photos et vidéos de ses collègues et d’avoir fait des commentaires désobligeants, sexistes, homophobes et insultants dans un groupe de discussion du réseau social Snapchat réunissant des collègues ainsi que des personnes extérieures à l’entreprise.

Le salarié conteste son licenciement. Il soutient que les faits qui lui sont reprochés sont intervenus dans le cadre d’échanges privés sur une messagerie qui n’était pas professionnelle et qui n’avait pas été utilisée sur du matériel professionnel. Selon lui, ces faits ne pouvaient donc pas être invoqués à l’appui d’un licenciement.

L’employeur fait, quant à lui, valoir que :

  • les échanges concernaient des personnes avec lesquelles le salarié était en contact dans le cadre du travail ;
  • dans la grande majorité des cas, ces échanges avaient lieu pendant le temps et sur le lieu de travail. Les photos étaient d’ailleurs prises dans les locaux de l’entreprise ;
  • il s’agissait de photos de collègues, voire de subordonnés, que le salarié avait connus uniquement du fait de son activité professionnelle ;
  • les échanges avaient de graves répercussions sur le bon fonctionnement de l’entreprise en créant un contexte professionnel hostile et malveillant ;
  • ces échanges constituaient un manquement aux obligations contractuelles du salarié qui, en tant que manager, se devait de faire preuve de professionnalisme et de bienveillance à l’égard de ses collègues de travail à l’intérieur ainsi qu’à l’extérieur de l’entreprise.

Le conseil de prud’hommes va dans le sens de l’employeur. Il constate notamment qu’il ressort de divers témoignages et captures d’écran que :

  • le groupe Snapchat servait de support à la diffusion de photos de salariées, prises parfois à leur insu, et trafiquées afin de leur donner une connotation sexuelle ;
  • le salarié participait activement à ce réseau et utilisait également ses outils professionnels pour véhiculer des propos misogynes ;
  • le salarié se permettait de faire des commentaires désobligeants et/ou de nature sexuelle sur les salariées de l’entreprise, ce qui était à l’origine d’un climat particulièrement malsain et difficile à vivre au sein de l’entreprise.

Ainsi, pour les juges du fond, le salarié « n’était pas simplement un spectateur passif, ce qui en soi était déjà à l’origine d’une faute au regard de son niveau hiérarchique, mais a activement contribué à alimenter en images et en commentaires dégradants sur ses collègues féminines un réseau social au sein de l’entreprise où il travaillait ». Ils en déduisent que ce comportement doit être analysé en une faute grave et ne permettait plus que le salarié continue à travailler au sein de l’entreprise. Ils reconnaissent également qu’il s’agit de faits de harcèlement sexuel, aggravé par la fonction de manager du salarié.

Le salarié est également condamné à payer 1 € de dommages-intérêts à la société en application des articles 1240 du Code civil (responsabilité civile délictuelle) et 32-1 du Code de procédure civile (procédure dilatoire ou abusive).

Note : Cette décision de première instance alimente la jurisprudence naissante sur cette question des liens entre entreprise et réseaux sociaux. En l’espèce, le conseil de prud’hommes considère que, compte tenu des circonstances et du niveau hiérarchique du salarié, même si les échanges avaient lieu sur un groupe Snapchat, ils étaient bien liés à la sphère professionnelle du salarié et ne relevaient donc pas du cadre privé.

Rappel : La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis (Cass. Soc., 26 février 1991, n° 88-44.908).
Généralement, l’employeur qui tolère un ou plusieurs agissements avant de les sanctionner ne peut pas prétendre qu’il s’agit d’une faute grave.
La validation, par la secrétaire générale, de demandes injustifiées de remboursement de frais caractérise-t-elle une tolérance de l’employeur l’empêchant de sanctionner cette pratique ?

Cass. Soc., 8 décembre 2021, n° 20-15.622

Une salariée, cadre dirigeante, est licenciée. Il lui est notamment reproché d’avoir effectué de nombreuses demandes de remboursement de frais professionnels non justifiées au regard de son activité.

La salariée conteste son licenciement. Elle estime que cette pratique faisait l’objet d’une tolérance de l’employeur puisque la secrétaire générale avait validé les demandes de remboursement litigieuses tout en sachant qu’elles n’étaient pas justifiées. Elle en déduit que ce comportement ne pouvait pas constituer une faute grave.

Pour la cour d’appel, « la signature [des] demandes de remboursement par la secrétaire générale [n’emportait] pas connaissance et approbation par l’employeur de la pratique frauduleuse de la salariée » et « la situation n’était pas connue et approuvée par la société ». Par conséquent, elle considère « qu’il n’était pas établi que l’employeur avait toléré ces demandes injustifiées de remboursements de frais ». La salariée est donc déboutée.

La Cour de cassation approuve la décision des juges du fond et rejette le pourvoi formé par la salariée contre l’arrêt d’appel.

Le licenciement est également justifié par un manquement à l’obligation de loyauté caractérisée par des travaux d’assistance personnelle du président du conseil de surveillance, dans le cadre d’activités réalisées par celui-ci pour des sociétés tierces, pendant les horaires de travail et avec le matériel de l’entreprise.

Note : Il semble que la solution aurait pu être différente si la tolérance de l’employeur avait été établie.

Rappel : Les objectifs d’un salarié, conditionnant la partie variable de sa rémunération, peuvent être définis par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction (Cass. Soc., 22 mai 2001, n° 99-41.838). Dans ce cas, les objectifs doivent être portés à la connaissance du salarié en début d’exercice (Cass. Soc., 2 mars 2011, n° 08-44.977). A défaut, en cas de contentieux, c’est le juge qui fixe le montant de la part variable et il peut condamner l’employeur à payer l’intégralité de la part variable même si les objectifs attendus n’ont pas été réalisés (Cass. Soc., 30 juin 2021, n° 19-25.519).
Les objectifs fixés pour une année sont-ils maintenus pour les années suivantes si le contrat de travail ne précise pas que ces objectifs doivent être fixés annuellement ?

Cass. Soc., 15 décembre 2021, n° 19-20.978

La rémunération d’un salarié comprend une partie fixe et une partie variable. Les modalités de la part variable de la rémunération ainsi que les objectifs à atteindre pour l’année 2013 sont définis dans une annexe au contrat de travail. Pour les années 2014 et 2015, l’employeur ne fixe pas de nouveaux objectifs. En 2016, le salarié réclame en justice un rappel de sa rémunération variable notamment sur les années 2014 et 2015.

L’employeur soutient que l’annexe au contrat de travail ne précisait pas que les objectifs devaient être fixés annuellement. Selon lui, il en résultait clairement que les objectifs n’étaient pas discutés chaque année et qu’ils étaient de facto maintenus, faute d’un autre accord entre les parties.

La cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, déboute l’employeur et fait droit à la demande du salarié. Interprétant le contrat de travail, les juges du fond estiment en effet que les objectifs avaient été fixés pour la seule année 2013 sans reconduction possible pour les années suivantes. Ils en concluent que l’employeur n’avait pas fixé d’objectifs au salarié pour les années 2014 et 2015 et qu’il devait donc verser au salarié un rappel de rémunération variable pour ces exercices.

Note : Cette solution laisse penser qu’une tacite reconduction des objectifs conditionnant la part variable de la rémunération est possible à condition de le prévoir expressément dans le contrat de travail. Le seul fait qu’il ne soit pas précisé que les objectifs doivent être fixés annuellement ne suffisant pas à établir cette possibilité.

Jurisprudence – Relations collectives

Rappel : Dans l’exercice de son mandat, le salarié protégé ne peut en principe être sanctionné par l’employeur que s’il abuse de ses prérogatives ou manque à ses obligations professionnelles (Cass. Soc., 22 novembre 2017, n° 16-12.109).
L’employeur peut-il exercer son pouvoir disciplinaire face à des faits de violence et d’intimidation entre salariés protégés survenus entre eux dans le cadre de l’exercice de leurs mandats ?

Cass. Soc., 24 novembre 2021, n° 19-25.145

Un salarié titulaire d’un mandat syndical est victime d’insultes et de violences de la part d’un autre délégué syndical dans le couloir des locaux mis à la disposition des syndicats par l’entreprise. Le salarié informe son employeur de ces faits et lui adresse sa plainte ainsi que la décision de rappel à la loi prise par le procureur de la République. L’employeur ne diligente aucune enquête et ne prend aucune sanction contre le délégué syndical en cause. Les deux salariés sont ainsi maintenus au sein du même service.

Quelques mois plus tard, le salarié subit de nouveau des actes d’intimidation de la part du même délégué syndical. Il en informe son employeur qui ne prend aucune mesure pour remédier à cette situation.

Le salarié demande en justice la condamnation de son employeur au paiement de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, harcèlement moral, exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité en matière de santé au travail.

Pour débouter le salarié de sa demande, la cour d’appel retient que l’altercation entre les deux salariés a eu lieu dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions syndicales, à un horaire où ils étaient en période de délégation syndicale et que le rappel à la loi pris par le procureur de la République n’était pas revêtu de l’autorité de la chose jugée. Elle en déduit que les décisions prises par la société sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral et à toute discrimination.

La Cour de cassation ne suit pas les arguments des juges du fond. Elle considère que « des faits de violence et d’intimidation commis dans l’entreprise par un salarié protégé caractérisent un abus dans l’exercice du mandat et un manquement aux obligations découlant du contrat de travail pouvant justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire ». La Haute Juridiction précise que « la circonstance [que ces faits soient] survenus dans le cadre de l’exercice du mandat n’est pas de nature à justifier la carence de l’employeur ».

Note : En cas de violences entre des représentants du personnel à l’occasion de l’exercice de leur mandat, l’employeur doit intervenir et prendre les mesures disciplinaires qui s’imposent. A défaut, il manque à son obligation de prévention des situations de harcèlement et pourrait être reconnu responsable d’une faute inexcusable en cas d’accident du travail.

Législation et réglementation

Après une adoption définitive le 29 novembre 2021 et une censure partielle par le Conseil constitutionnel dans une décision du 16 décembre 2021, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a été publiée au JO du 24 décembre 2021.

Elle prévoit notamment :

  • la possibilité pour les employeurs éligibles à l’aide au paiement des cotisations et contributions sociales d’imputer le solde du montant de cette aide sur les cotisations et contributions sociales dues au titre de l’année 2022 ;
  • la prolongation jusqu’à la fin de l’année 2022 du régime social simplifié des indemnités d’activité partielle ;
  • la prolongation jusqu’au 31 décembre 2022 des mesures relatives à l’indemnisation des arrêts de travail dérogatoires ;
  • l’amélioration de la protection sociale et de la couverture en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle des travailleurs des plateformes ;
  • l’extension du dispositif de retraite progressive aux salariés en forfait jours ou heures et aux mandataires sociaux.

Adoptée définitivement le 15 décembre 2021 et validée, pour l’essentiel, par le Conseil constitutionnel le 28 décembre 2021, la loi de finances pour 2022 a été publiée au JO du 31 décembre 2021.

Elle prolonge et pérennise certaines mesures en matière d’activité partielle (au-delà des mesures prises du fait de la crise sanitaire). Sont ainsi inscrites dans la loi :

  • la prise en compte des heures supplémentaires dites « structurelles » dans le calcul de l’indemnité et de l’allocation d’activité partielle ;
  • l’appréciation de la réduction de l’horaire de travail pour les salariés soumis à des conventions de forfait en heures;
  • l’intégration au régime d’activité partielle des salariés n’ayant pas de durée du travail décomptée en heures et/ou non soumis aux dispositions légales ou conventionnelles relatives à la durée de travail ;
  • la possibilité d’ouvrir l’activité partielle aux cadres dirigeants dans les cas de fermeture temporaire de leur établissement ou partie d’établissement ;
  • le maintien, pour les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation rémunérés en deçà du SMIC, d’une indemnité d’activité partielle d’un montant égal au niveau de leur rémunération antérieure avec un reste à charge nul pour l’employeur. Pour les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation rémunérés au-dessus du SMIC, il serait prévu que le taux horaire de l’indemnité d’activité partielle soit au moins égal au taux horaire du SMIC.

Sur le fondement de la loi de finances, un décret n° 2021-1918 du 30 décembre 2021 également publié au JO du 31 décembre 2021 précise les modalités de calcul de l’indemnité et de l’allocation d’activité partielle pour les salariés en forfait jours, le personnel navigant, les VRP, les travailleurs à domicile, les journalistes pigistes, les intermittents du spectacle et les cadres dirigeants. Les dispositions sont celles qui avaient été envisagées dans le projet de décret soumis aux partenaires sociaux le 7 décembre 2021 (cf. Actu Tendance n° 610).

La loi de finances pour 2022 prolonge l’éligibilité à l’activité partielle de certains employeurs et salariés ayant des statuts spécifiques jusqu’au 31 décembre 2022 (salariés de droit privé de certains employeurs de droit public exerçant une activité industrielle et commerciale ; entreprises étrangères ne comportant pas d’établissement en France et employant au moins un salarié sur le territoire français ; salariés des remontées mécaniques, pistes de ski et cures thermales).

En outre, cette loi habilite le Gouvernement, jusqu’au 31 juillet 2022, à prendre, par ordonnance, des mesures d’adaptation du dispositif d’activité partielle de longue durée compte tenu de l’évolution de la situation sanitaire.

La loi de finances pour 2022 prévoit également :

  • une exonération de cotisations et contributions sociales pour les pourboires remis au cours des années 2022 et 2023 aux salariés dont la rémunération (hors pourboires) n’excède pas 1,6 Smic ;
  • une modification de la période de référence pour le calcul de l’effectif d’assujettissement à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés : par dérogation à l’article L. 130-1 du Code de la sécurité sociale qui prévoit que l’année de référence est l’année précédente, la période à retenir pour apprécier le nombre de salariés est l’année au titre de laquelle la contribution OETH est due ;
  • des dispositions aménageant le système de financement de la formation professionnelle et de l’alternance, notamment, un régime transitoire permettant de garantir le versement en 2022 par toutes les entreprises du solde de la taxe d’apprentissage au titre de la masse salariale 2021.

Face à la dégradation de la situation sanitaire, le Gouvernement prévoit une série de mesures et l’administration apporte certaines précisions.

Activité partielle

Deux décrets n° 2021-1816 et n° 2021-1817 du 27 décembre 2021 publiés au JO du 28 décembre 2021 prolongent la modulation des taux d’activité partielle. Ainsi, conformément aux projets transmis aux partenaires sociaux le 9 décembre 2021 les taux d’allocation et d’indemnité d’activité partielle de 70 % sont prolongés jusqu’au 31 janvier 2022 pour les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire (cf. Actu Tendance n° 611).

Par ailleurs, compte tenu de la revalorisation du Smic, le décret n° 2021-1878 du 29 décembre 2021 publié au JO du 30 décembre 2021 modifie le taux horaire minimum de l’allocation d’activité partielle et de l’allocation d’activité partielle spécifique en cas de réduction d’activité durable. Depuis le 1er janvier 2022, ces taux sont passés respectivement de 7,47 € à 7,53 € et de 8,30 € à 8,37 €.

Télétravail

Le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 a été mis à jour le 3 janvier 2022. Pour une durée de trois semaines à compter de cette date, il est demandé aux employeurs de fixer un nombre minimal de trois jours en moyenne de télétravail par semaine, pour les postes qui le permettent, ce nombre pouvant être porté à quatre jours par semaine lorsque la situation le permet.

Pour conférer à cette mesure et aux autres mesures préconisées par le protocole sanitaire une portée potentiellement contraignante, le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire, adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale le 5 janvier, instaure une amende de 1 000 € par salarié concerné dans la limite de 50 000 €, en cas de situation dangereuse résultant d’un risque d’exposition au virus Covid-19 du fait du non-respect par l’employeur des principes généraux de prévention prévus par le Code du travail. Ce régime de sanction pourrait être appliqué jusqu’à une date prévue par décret et au plus tard jusqu’au 31 juillet 2022.

Ce projet de loi prévoit, par ailleurs :

  • de transformer, à compter du 15 janvier 2022, le passe sanitaire en passe vaccinal pour l’accès aux activités de loisirs, aux restaurants et débits de boissons, aux foires, séminaires et salons professionnels et aux transports interrégionaux actuellement soumis au passe sanitaire. La passe sanitaire serait maintenu uniquement pour l’accès aux établissements et services de santé et médico‑sociaux ;
  • la possibilité de reporter certaines visites médicales effectuées dans le cadre du suivi de l’état de santé des travailleurs, à l’exception de la visite médicale avant le départ à la retraite et sauf lorsque le médecin du travail les estime indispensables. Cette possibilité concerne les visites médicales dont l’échéance intervient ou doit intervenir entre le 15 décembre 2021 et une date fixée par décret et au plus tard le 31 juillet 2022. Le report est limité à un an suivant leur échéance.

Après son adoption en première lecture par l’Assemblée Nationale le 5 janvier 2022, le texte a été transmis au Sénat, où il sera examiné les 11 et 12 janvier. Une commission mixte paritaire devrait ensuite se réunir.

Règles d’isolement

Depuis le 3 janvier 2022, les règles d’isolement des cas contacts et des cas positifs ont été simplifiées. Elles sont désormais identiques quel que soit le variant contaminant.

Tests Covid

Dans le cadre d’une mise à jour effectuée le 24 décembre 2021, le Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) a apporté des précisions concernant la prise en charges des tests de dépistage du Covid effectués par les salariés.

Il est ainsi précisé que « Lorsqu’un salarié est soumis à l’obligation de présenter un passe sanitaire pour exercer son activité professionnelle dans certains lieux (notamment dans le secteur de l’hôtellerie-restauration), les frais engagés pour réaliser un test virologique ne constituent pas un frais professionnel (…). Si l’employeur décide de prendre ces frais en charge, le montant remboursé constitue un avantage en nature à intégrer dans l’assiette de cotisations et contributions sociales ».

Une exception est toutefois admise : « lorsqu’un salarié est soumis de manière ponctuelle à une obligation de présentation d’un test virologique négatif, dans le cadre d’une mission spécifique à la demande de son employeur (par exemple pour un déplacement professionnel à l’étranger pour lequel un tel test négatif est requis), et qu’il n’existe aucune alternative à la réalisation de ce test, alors le coût du test virologique constitue un frais professionnel. L’employeur est tenu de le rembourser. Ce remboursement ne donne pas lieu à cotisations et contributions sociales ».

Par exemple, « Si un salarié doit se rendre dans un pays tiers qui exige un test et que la vaccination ne constitue pas un moyen de se soustraire à cette obligation, le coût du test constitue un frais professionnel ». En revanche, « si un salarié doit effectuer un déplacement professionnel sur le territoire national, ce qui nécessite la présentation d’un passe sanitaire, les frais liés à un éventuel test virologique négatif ne constituent pas des frais professionnels. Si l’employeur décide de les prendre en charge, le montant remboursé constitue un avantage en nature ».

Restauration en entreprise

En février 2021, les dispositions du Code du travail relatives aux locaux de restauration dans les entreprises ont été aménagées. Ainsi, lorsque la configuration du local de restauration ou de l’emplacement normalement dédié à la restauration ne permet pas de garantir le respect des règles de distanciation physique, l’employeur peut prévoir un ou plusieurs autres emplacements notamment à l’intérieur des locaux affectés au travail.

Ces aménagements devaient prendre fin à l’expiration d’un délai de six mois suivant la cessation de l’état d’urgence sanitaire (Décret n° 2021-156 du 13 février 2021, JO 14 février 2021). Un projet de décret envisage de les prolonger jusqu’au 31 juillet 2022.

Risques biologiques

Un arrêté du 18 décembre 2020 (JO 31 décembre 2020) entré en vigueur le 19 juillet 2021 a classé le Covid-19 dans la liste des agents biologiques pathogènes et le décret n° 2021-951 du 16 juillet 2021 a adapté certaines dispositions relatives à la prévention des risques biologiques à des entreprises qui ne relèvent habituellement pas de cette réglementation.

Le ministère du travail apporte des éclaircissements à ce sujet (champ d’application, dispositions applicables…) dans un questions-réponses publié sur son site Internet le 23 décembre 2021.

L’employeur doit faire bénéficier chaque salarié tous les 2 ans d’un entretien professionnel. Tous les 6 ans cet entretien doit dresser un état des lieux récapitulant le parcours professionnel du salarié (C. trav. art. L. 6315-1). A défaut, l’employeur doit verser un abondement correctif de 3 000 € sur le CPF du salarié (C. trav. art. R. 6323-3).

Un décret du 30 décembre 2021 précise le calendrier de versement de cet abondement correctif. Ainsi, l’employeur doit verser cet abondement à la Caisse des dépôts et consignations au plus tard, le dernier jour du trimestre civil suivant la date de l’entretien professionnel pris en compte pour apprécier la période de six ans. Des dispositions transitoires sont prévues pour les versements relatifs aux entretiens récapitulatifs qui devaient être effectués en 2020 et 2021 : le versement de l’abondement correctif et la transmission des informations nécessaires à l’abondement (montant, nom du salarié bénéficiaire, données permettant son identification) doivent être effectués au plus tard le 31 mars 2022.