Actu-tendance n° 617

Jurisprudence – Relations individuelles

Rappel : Les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, proportionnées au but recherché et répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante (C. trav. art. L. 1121-1, L. 1132-1 et L. 1133-1).
La notion d’« exigence professionnelle essentielle et déterminante » renvoie à une exigence objectivement dictée par la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle en cause (CJUE, 14 mars 2017, n° C-188/15).
La sanction du salarié ayant refusé une mutation pour des raisons religieuses constitue-t-elle nécessairement une discrimination ?

Cass. Soc., 19 janvier 2022, n° 20-14.014

Le contrat de travail d’un chef d’équipe de nettoyage comporte une clause de mobilité. A la suite du transfert de son contrat de travail à une nouvelle entreprise, ladite clause de mobilité est mise en œuvre et le salarié est informé de sa mutation sur un nouveau site. Le salarié ayant refusé cette mutation, son employeur lui notifie une nouvelle mutation sur le site d’un cimetière. Le salarié refuse également cette mutation en invoquant une incompatibilité d’horaire avec ses autres obligations professionnelles. Après modification par l’employeur des horaires de travail, le salarié refuse à nouveau cette mutation en invoquant que ses convictions religieuses hindouistes lui interdisent de travailler dans un cimetière. A l’issue d’une procédure disciplinaire, le salarié se voit notifier une mutation disciplinaire sur un autre site qu’il refuse. Après avoir été mis en demeure de rejoindre son poste, le salarié est licencié pour cause réelle et sérieuse. Il demande en justice l’annulation de sa mutation disciplinaire et de son licenciement.

La cour d’appel fait droit à ses demandes. Pour prononcer l’annulation de la mutation disciplinaire, les juges du fond retiennent que « les faits laissant supposer une discrimination sont établis, puisque le salarié a été muté disciplinairement pour avoir refusé de rejoindre le poste sur lequel il était affecté alors qu’il justifiait son refus par l’exercice de ses convictions religieuses ». Ils estiment que, « en présence du refus d’un salarié de se rendre sur un site d’affectation en raison de ses convictions religieuses, ressortant des libertés et droits fondamentaux de celui-ci, il appartient à l’employeur de rechercher si, tout en tenant compte des contraintes inhérentes à l’entreprise et sans que celle-ci ait à subir une charge supplémentaire, il lui est possible de proposer au salarié un poste de travail compatible avec les exigences de chacune des parties ». Or, ils constatent que, en l’espèce, « l’employeur n’a pas fait cette démarche alors qu’il disposait d’un poste susceptible de recevoir l’affectation du salarié puisqu’il l’y a muté disciplinairement ». Les juges du fond en déduisent que l’employeur n’a pas démontré que la sanction prononcée était étrangère à toute discrimination et qu’elle doit donc être annulée. Par conséquent, la cour d’appel estime que, « la mutation disciplinaire ayant été annulée, l’employeur ne peut valablement reprocher au salarié son refus de rejoindre son poste et ce, quels que soient les motifs avancés à l’appui de ce nouveau refus ». Les juges du fond en concluent que « la sanction ayant été annulée en raison de son caractère discriminatoire, le licenciement prononcé en partie pour non-respect par le salarié de cette obligation revêt également un caractère discriminatoire et doit donc être annulé ».

La Cour de cassation censure le raisonnement des juges du fond. Elle juge que la mutation disciplinaire litigieuse était justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante au regard :

  • « d’une part de la nature et des conditions d’exercice de l’activité du salarié, chef d’équipe dans le secteur de la propreté, affecté sur un site pour exécuter ses tâches contractuelles en vertu d’une clause de mobilité légitimement mise en œuvre par l’employeur ;
  • d’autre part du caractère proportionné au but recherché de la mesure, laquelle permettait le maintien de la relation de travail par l’affectation du salarié sur un autre site de nettoyage ».

La Haute juridiction considère donc que la cour d’appel aurait dû en déduire que « la mutation disciplinaire ne constituait pas une discrimination directe injustifiée en raison des convictions religieuses et que, dès lors, le licenciement du salarié n’était pas nul ».

Note : Ainsi, si l’employeur doit respecter les opinions et les convictions religieuses de ses salariés et ne peut apporter de restrictions à cette liberté que si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, le salarié ne peut pas, quant à lui, réclamer un traitement particulier en raison de ses croyances, sauf stipulation contractuelle ou usage en ce sens (Cass. Soc., 24 mars 1998 n° 95-44.738).

Rappel : Chacun a droit au respect de sa vie privée (C. Civ. art. 9). L’employeur doit respecter la vie personnelle de ses salariés ainsi que les droits des personnes et les libertés individuelles et collectives notamment le droit à l’image. Il ne peut utiliser la photographie d’un salarié qu’avec l’accord de ce dernier.
Le salarié, dont la demande de retrait du site Internet de l’entreprise d’une photographie sur laquelle il apparaît n’a pas été prise en compte immédiatement, a-t-il droit à des dommages-intérêts ?

Cass. Soc., 19 janvier 2022, n° 20-12.420

Après leur licenciement économique en mars 2014, deux salariés demandent à leur ancien employeur, en juillet 2015, de supprimer, du site Internet de l’entreprise, une photographie de l’ensemble de l’équipe sur laquelle ils apparaissent. L’employeur ne se conforme pas immédiatement à la demande. Il ne supprime la photographie litigieuse qu’après la communication des conclusions de première instance. Les salariés demandent en justice des dommages-intérêts au titre du droit à leur image.

Ils sont déboutés de leur demande par la cour d’appel qui retient que :

  • « chacun des salariés a été photographié avec l’ensemble de l’équipe pour apparaître sur le site Internet »;
  • l’employeur a fini par supprimer la photographie litigieuse ;
  • « les salariés ne démontrent aucunement l’existence d’un préjudice personnel, direct et certain résultant du délai de suppression de la photographie en question ».

Cette décision est cassée par la Haute juridiction. Celle-ci considère qu’il résulte de l’article 9 du Code civil que « le droit dont la personne dispose sur son image porte sur sa captation, sa conservation, sa reproduction et son utilisation, et que la seule constatation d’une atteinte ouvre droit à réparation ». En l’espèce, la seule constatation de l’atteinte au droit à l’image ouvrait donc droit à réparation.

Note : Si l’employeur souhaite utiliser l’image d’un salarié, il est recommandé de recueillir son autorisation expresse et écrite. Une fois le consentement recueilli, il convient de conserver une certaine vigilance car :

  • ce consentement ne vaut pas accord pour de nouvelles diffusions ayant un objet distinct de la première diffusion, un nouveau consentement étant nécessaire dans ce cas (CA Douai, 31 janvier 2012, n° 11/00586) ;
  • l’accord donné à la réalisation d’une image ne vaut pas autorisation de la diffuser dans un objectif commercial et publicitaire (CA Amiens, 4 septembre 2013, n° 12/01271) ;
  • le salarié est en droit de réclamer qu’une photo de lui cesse d’être utilisée par l’entreprise. Dans ce cas, l’employeur se trouve dans l’obligation de respecter cette demande et de réagir dans les plus brefs délais.
Rappel : La règle « à travail égal, salaire égal » oblige l’employeur à assurer une égalité de rémunération entre les salariés placés dans une situation identique (Cass. Soc., 8 mars 2005, n° 02-45.848). En cas de litige, il appartient au juge de procéder à l’analyse comparée des situations des salariés en cause.
Une cour d’appel peut-elle retenir l’inégalité de traitement en se fondant sur l’absence de critères d’éligibilité à une prime ?

Cass. Soc., 12 janvier 2022, n° 20-13.645

Se fondant sur une inégalité de traitement, un salarié saisit la justice afin d’obtenir la condamnation de son employeur à lui verser notamment un rappel de prime trimestrielle de remplacement.

L’employeur soutient que le versement de ladite prime à certains salariés de l’entreprise était la contrepartie de la sujétion à laquelle ils étaient soumis, tenant à pouvoir être appelés à tout moment, même lorsqu’ils étaient de repos, afin de garantir la continuité de l’activité. Selon lui, le salarié concerné, qui n’était pas soumis à cette sujétion, n’était pas placé dans la même situation que les salariés auxquels il se comparait.

La cour d’appel donne raison au salarié. Elle estime que l’entreprise ne rapportait pas la preuve des critères selon lesquels certains salariés, issus de toutes les catégories professionnelles, étaient éligibles à la prime litigieuse. En effet, elle constate notamment que :

  • le directeur des filiales de l’entreprise avait énoncé au cours d’une assemblée générale qu’« une prime était octroyée à certains salariés », qu’« il ne trouvait pas ça normal », qu’il « ignorait l’objectif de cette prime » ;
  • un salarié avait perçu la prime « pour travailler en cas de grève »;
  • lors d’une réunion du comité d’entreprise (devenu CSE), à la question posée à la direction de savoir pourquoi une prime avait été octroyée à certains salariés, le représentant de la direction et la responsable des ressources humaines ont répondu « qu’ils ne savaient pas » et à une nouvelle question sur la raison de leur suppression, il a été répondu par la direction qu’elles « n’avaient pas d’utilité ».

Les juges du fond en déduisent que le salarié a apporté des éléments de nature à établir l’inégalité de traitement.

L’argumentaire de la cour d’appel n’est pas suivi par la Cour de cassation. Après avoir rappelé le principe « à travail égal, salaire égal », celle-ci reproche aux juges du fond de ne pas avoir procédé à « une analyse comparée de la situation, des fonctions et des responsabilités effectivement exercées par le salarié et les autres salariés auxquels il se comparaît ».

Note : Ainsi, en cas de litige relatif à l’application du principe d’égalité de rémunération, le juge doit absolument procéder à une comparaison de la situation, des fonctions et des responsabilités effectivement exercées par les salariés en cause, sans pouvoir se fonder sur l’imprécision de l’objet d’une prime.

Rappel : Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas, en principe, justifier un licenciement disciplinaire (Cass. Soc., 26 septembre 2001, n° 99-43.636), sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Cass. Soc., 3 mai 2011 n° 09-67.464) ou s’il se rattache à sa vie professionnelle (Cass. Soc., 30 novembre 2010, n° 09-40.695).
L’accident d’un salarié en état d’ébriété avec son véhicule de fonction au retour d’un salon professionnel peut-il justifier un licenciement pour faute grave ?

Cass. Soc., 19 janvier 2022, n° 20-19.742

Sur le trajet retour d’un salon professionnel, auquel il s’est rendu sur instruction de son employeur, un salarié conduit son véhicule de fonction sous l’emprise de l’alcool. Un accident de la circulation se produit. Il est licencié pour faute grave.

Le salarié conteste son licenciement. Il soutient notamment que :

  • « l’accident s’est produit en dehors du temps de travail, entre 22 heures et 23 heures et qu’il n’était plus sous la subordination de son employeur ;
  • le fait que le véhicule endommagé soit une voiture de fonction ne suffisait pas à conférer à l’accident un caractère professionnel dès lors qu’il l’utilisait tant dans le cadre de sa vie professionnelle que personnelle ;
  • l’accident ne s’était pas produit durant un trajet anormal et inhabituel dépassant le temps de trajet domicile-travail, dès lors qu’il n’avait reçu aucune contrepartie financière ou de repos à ce titre ».

La cour d’appel, approuvée par la Cour de cassation, déboute le salarié. Elle estime que les faits reprochés au salarié, lequel ne contestait pas leur matérialité, se rattachaient à la vie professionnelle de celui-ci.

Note : Dans cette affaire, les juges ont considéré que les faits reprochés au salarié se rattachaient à sa vie professionnelle.

Il est toutefois conseillé de faire preuve d’une grande prudence sur ce point car la distinction entre vie personnelle et vie professionnelle peut s’avérer délicate.

A noter que, s’il ne peut pas justifier un licenciement disciplinaire, un fait de la vie personnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement s’il a créé un trouble caractérisé au sein de l’entreprise (Cass. Soc., 30 novembre 2005, n° 04-13.877).

Jurisprudence – Relations collectives

Rappel : Le licenciement d’un membre du CSE, titulaire ou suppléant ou d’un représentant syndical au CSE, ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail (C. trav. art. L. 2411-5, al. 1).
L’ancien membre du CSE ainsi que l’ancien représentant syndical qui, désigné depuis deux ans, n’est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité bénéficient également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l’expiration de leur mandat ou la disparition de l’institution (C. trav. art. L. 2411-5, al. 2).
Cette procédure spécifique de licenciement s’applique dès lors que le salarié est protégé à la date d’envoi par l’employeur de sa convocation à l’entretien préalable au licenciement (Cass. Soc., 26 mars 2013, n° 11-27.964).
Le membre du CSE dont la décision d’autorisation de licenciement a été annulée est réintégré dans son mandat si l’institution n’a pas été renouvelée. Dans le cas contraire, il bénéficie pendant une durée de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l’entreprise, de la protection prévue pour les anciens membres du CSE (C. trav. art. L. 2422-2).
Quel est le point de départ de la protection dont bénéficie le salarié protégé réintégré dans l’entreprise mais pas dans son mandat à la suite de l’annulation de l’autorisation de licenciement ?

CE, 24 janvier 2022, n° 443356

A la suite de l’annulation de l’autorisation de son licenciement, un salarié protégé sollicite sa réintégration par courrier du 4 décembre 2015 reçu par son employeur le 16 décembre 2015. Son contrat de travail ayant été transféré entre temps, il est réintégré chez son nouvel employeur le 19 janvier 2016 sans être réintégré dans ses mandats représentatifs.

Le 19 juillet 2016, le salarié est convoqué à un entretien préalable en vue d’un licenciement pour faute. L’inspection du travail autorise le licenciement. Cette décision est annulée par le ministre du travail au motif qu’à la date de convocation à l’entretien préalable le salarié ne bénéficiait plus de la protection attachée aux mandats qu’il avait exercés, de sorte que l’inspection du travail n’était pas compétente pour se prononcer sur la demande d’autorisation de licenciement.

Le salarié conteste cette dernière décision. Il est débouté par le tribunal administratif puis par la cour administrative d’appel. Celle-ci retient que le salarié a été « réintégré dans l’entreprise à compter du 16 décembre 2015, date à laquelle il a demandé sa réintégration, et qu’ainsi le délai de six mois de protection était expiré à la date du 19 juillet 2016 à laquelle il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement ».

Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement. Il rappelle que :

  • d’une part, l’autorisation de licenciement des salariés investis de fonctions représentatives « est requise si le salarié bénéficie de la protection attachée à son mandat à la date de l’envoi par l’employeur de sa convocation à l’entretien préalable au licenciement »;
  • d’autre part, l’article L. 2422-2 du Code du travail prévoit que le représentant du personnel, « dont la décision d’autorisation de licenciement a été annulée, est réintégré dans son mandat si l’institution n’a pas été renouvelée. Dans le cas contraire, il bénéficie pendant une durée de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l’entreprise, de la protection prévue [pour les anciens représentants du personnel]».

La Haute juridiction administrative en déduit que « le salarié protégé qui, à la suite de l’annulation de la décision autorisant son licenciement, est réintégré dans l’entreprise sans pour autant être réintégré dans son mandat représentatif, bénéficie de la protection prévue [pour les anciens représentants du personnel] pendant une durée de six mois à compter du jour de sa reprise effective du travail dans l’entreprise ».

Ainsi, en l’espèce, le délai de protection de six mois avait débuté à compter du 19 janvier 2016, date effective de réintégration, et non à compter du 16 décembre 2015, date de la demande de réintégration, de sorte qu’il n’était pas expiré au 19 juillet 2016, date de la convocation à entretien préalable.

Note : La Cour de cassation avait déjà précisé que le délai de protection de six mois « court, lorsque l’emploi n’existe plus ou n’est plus vacant, à compter du jour où l’employeur exécute son obligation de réintégration en proposant au salarié un emploi équivalent, comportant le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière » (Cass. Soc., 17 mai 2017, n° 14-29.610).

Rappel : Lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l’inspecteur du travail autorisant le licenciement d’un salarié investi d’un mandat représentatif, ou lorsque le juge administratif annule la décision d’autorisation de l’inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s’il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent (C. trav. art. L. 2422-1).
S’agissant des élections professionnelles, lorsque la contestation porte sur l’électorat, la requête n’est recevable que si elle est remise ou adressée dans les trois jours suivant la publication de la liste électorale. Lorsque la contestation porte sur la régularité de l’élection, la requête n’est recevable que si elle est remise ou adressée dans les quinze jours suivant cette élection ou cette désignation (C. trav. art. R. 2314-24).
À moins qu’elles ne soient directement contraires aux principes généraux du droit électoral, les irrégularités commises dans l’organisation et le déroulement du scrutin ne constituent une cause d’annulation que si elles ont exercé une influence sur le résultat des élections ou si, s’agissant du premier tour, elles ont été déterminantes de la qualité représentative des organisations syndicales dans l’entreprise, ou du droit pour un candidat d’être désigné délégué syndical (Cass. Soc., 13 janvier 2010, n° 09-60.203).
Le refus de réintégrer un salarié protégé à la suite de l’annulation de l’autorisation de licenciement peut-il justifier l’annulation des élections professionnelles ?

Cass. Soc., 19 janvier 2022, n° 21-10.264

Un salarié protégé, dont l’autorisation de licenciement a été annulée, sollicite, par lettre du 8 avril 2019, sa réintégration qui est refusée par la société le 18 avril 2019. Constatant que les élections professionnelles sont en cours d’organisation avec la conclusion d’un accord préélectoral le 18 avril 2019 prévoyant une publication des listes électorales le 13 mai 2019, le salarié informe la société, par lettre du 14 mai 2019, qu’il est susceptible de contester les élections, à défaut pour la société de faire droit à sa demande de réintégration et de le mettre en mesure de se porter candidat. Les élections se tiennent en juin 2019. Le salarié demande en justice leur annulation au motif qu’il a été privé de la possibilité d’être électeur et de se présenter comme candidat.

Le tribunal ayant fait droit à sa demande, l’employeur se pourvoit en cassation. Il soutient notamment que :

  • la demande du salarié, introduite fin juin 2019, était forclose car « la contestation du refus d’inscription sur la liste électorale d’un salarié protégé ayant demandé sa réintégration à la suite de l’annulation de l’autorisation de son licenciement porte sur l’électorat dès lors que ce salarié n’a pas fait acte de candidature et doit donc, à peine de forclusion, être introduite dans les trois jours de la publication de la liste électorale » ;
  • « le refus de réintégration opposé à un salarié protégé et son défaut d’inscription sur la liste des électeurs […] ne portent pas atteinte aux principes généraux du droit électoral de sorte qu’ils ne peuvent [pas] entraîner l’annulation des élections en l’absence d’incidence démontrée sur les résultats du scrutin, a fortiori lorsque le salarié ne s’est pas porté candidat ».

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle rappelle que « toute personne intéressée est recevable à contester le résultat des élections » et que lorsque l’autorisation de licenciement est annulée, le salarié investi d’un mandat représentatif a le droit, s’il en fait la demande, d’être réintégré. Il en résulte, selon la Haute juridiction, que, dès lors que le salarié a demandé sa réintégration dans les délais, le contrat de travail se poursuit et le salarié est électeur et éligible aux élections professionnelles. Par conséquent, elle considère que l’action du salarié fondée sur son impossibilité, faute de réintégration, d’être électeur et éligible, ne portait pas seulement sur l’électorat mais également sur la régularité des élections et était donc recevable.

La Cour de cassation estime, par ailleurs, que le refus illégal d’un employeur de réintégrer un salarié protégé et, par voie de conséquence, de lui permettre d’être électeur et éligible aux élections professionnelles, constitue une irrégularité qui a influencé le résultat du scrutin et justifie à elle seule l’annulation des élections.

Note : Si, en cas d’annulation de l’autorisation de licenciement, le salarié protégé souhaite obtenir sa réintégration et en fait la demande dans les délais, cette réintégration s’impose à l’employeur. Seule une impossibilité absolue permet d’échapper à cette obligation.

Législation et réglementation

Depuis le 1er janvier 2022, le modèle de bulletin de paie a évolué en application d’un arrêté et d’un arrêté rectificatif du 23 décembre 2021.

Désormais, la rubrique « Impôt sur le revenu » doit intégrer :

  • la mention du « Montant net imposable » qui était jusqu’à présent facultative, correspondant au montant de la rémunération brute du salarié duquel sont déduites les sommes payées et avantages en argent ou en nature mentionnés à l’article 83 du Code général des impôts, ainsi que la CSG déductible de l’impôt sur le revenu, auquel est ajoutée, le cas échéant, la part imposable des contributions des employeurs destinées au financement des prestations de protection sociale complémentaire ;
  • la mention du « Montant net des heures compl/ suppl. exonérées » égale à la valeur brute des éléments de rémunération entrant dans le champ de l’exonération au titre des heures supplémentaires et complémentaires, réduite de la CSG déductible de l’impôt sur le revenu ;
  • une colonne « Cumul annuel » correspondant à la somme des valeurs figurant sur les bulletins de paie déjà émis par l’employeur au titre des périodes comprises entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année à laquelle ils se rapportent.

La mention du taux du prélèvement à la source ne comporte plus l’indication « personnalisé » ou « non personnalisé ».

Dans la rubrique « Net à payer », la mention « Net payé en euros » est renommée « Net à payer au salarié ». Il est précisé que les mentions « Net à payer avant impôt sur le revenu » et « Net à payer au salarié » ainsi que les montants associés doivent apparaître d’une manière qui en facilite la lisibilité par rapport aux autres lignes. Auparavant, il était exigé que soit utilisé un corps de caractère dont le nombre de points était au moins égal à une fois et demie le nombre de points du corps de caractère utilisé pour la composition des intitulés des autres lignes.

La rubrique « Exonérations de cotisations Employeur » est renommée « Exonérations, écrêtements et allégements de cotisations ». Elle doit contenir une colonne « Part salarié » et une colonne « Part employeur ».

Pour les bulletins de paie remis aux salariés affiliés au régime local d’assurance maladie complémentaire obligatoire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, l’arrêté supprime la ligne « Apec » et les valeurs correspondant aux « taux salarial » et à la « part salarié » de la ligne « Sécurité Sociale-Maladie maternité Invalidité Décès ».

L’arrêté initial avait également supprimé la rubrique « Allégements de cotisations employeur » mais cette rubrique a été rétablie par un arrêté rectificatif.

En principe, les employeurs assujettis à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés doivent effectuer la déclaration relative à cette obligation dans la DSN de février exigible le 5 ou 15 mars. La contribution annuelle, si elle est due, doit être versée à la date de la déclaration (C. trav. art. D. 5212-8).

En outre, les informations relatives aux effectifs (effectif d’assujettissement, nombre de bénéficiaires devant être employés, effectif de bénéficiaires employés, effectif de bénéficiaires employés relevant d’un Ecap [emploi exigeant des conditions d’aptitudes particulières]) doivent être transmises par l’Urssaf aux entreprises au plus tard le 31 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle la déclaration est effectuée (C. trav. art. D. 5212-5).

Toutefois, dans une actualité publiée sur son site Internet le 26 janvier dernier, l’Urssaf reporte l’exigibilité de la déclaration. Ainsi, elle indique que « afin de simplifier leur gestion par les entreprises, la déclaration annuelle de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés (OETH) ainsi que le paiement de la contribution seront désormais à effectuer, par toutes les entreprises de 20 salariés et plus, sur la DSN d’avril (exigible le 5 ou 15 mai) au titre de l’obligation d’emploi de l’année précédente ».

Au titre de l’obligation d’emploi de l’année 2021, la déclaration et le paiement de la contribution devront donc être effectués dans la DSN d’avril 2022 (exigible le 5 ou 16 mai 2022).

L’Urssaf indique, également, que les informations relatives aux effectifs seront calculées et mises à disposition des entreprises, avant le 15 mars 2022, au titre de l’exercice annuel 2021.

Par ailleurs, l’Urssaf précise que « les entreprises qui déposent un accord pour agrément doivent le transmettre à l’autorité administrative compétente (DDETS/DGEFP) au plus tard le 31 mai de la première année de mise en œuvre du programme. Elles pourront ainsi prendre en compte les derniers éléments constitutifs de la dernière déclaration en DSN ».

Deux décrets n° 2022-77 et n° 2022-78 du 29 janvier 2022 publiés au JO du 28 janvier 2022 prolongent la modulation des taux d’activité partielle. Ainsi, conformément aux projets de textes soumis aux partenaires sociaux le 21 janvier dernier (cf. Actu Tendance n° 616), les taux d’allocation et d’indemnité d’activité partielle de 70 % permettant aux secteurs les plus touchés par la crise sanitaire de conserver un reste à charge nul, sont prolongés jusqu’au 28 février 2022.

S’agissant des entreprises éligibles à cette prise en charge intégrale de l’activité partielle, le Ministère du travail a mis à jour, le 26 janvier dernier, son questions-réponses relatif à l’activité partielle afin de prendre en compte l’allègement des restrictions sanitaires.

Ainsi, « les mesures de restriction suivantes, applicables à compter du 3 janvier, sont assimilées à des fermetures administratives partielles d’établissements recevant du public (ERP) [sans avoir à justifier d’une perte de chiffre d’affaires] et donnent droit, pour les ERP concernés, au bénéfice des taux majorés d’allocation et d’indemnité à 70 % :

Jusqu’au 1er février 2022 inclus :

Les ERP soumis aux jauges pour les grands événements : 2000 personnes en intérieur, 5000 personnes en extérieur dans les établissements sportifs, les salles d’auditions, de conférences, de projection, de réunions, de spectacles ou à usages multiples, et les chapiteaux, tentes et structures ;

Jusqu’au 15 février 2022 inclus :

  • Les ERP soumis à l’obligation de places assises (établissements sportifs, les salles d’auditions, de conférences, de projection, de réunions, de spectacles ou à usages multiples, et les chapiteaux, tentes et structures) ;
  • Les ERP soumis à l’interdiction de la consommation debout dans les cafés, bars et restaurants : seuls les établissements dont l’activité est directement affectée par l’interdiction de consommer debout pourront bénéficier des taux majorés au titre d’une fermeture administrative partielle. Les services de l’État seront particulièrement vigilants quant au respect de cette condition. ;
  • Les ERP affectés par l’interdiction de vente et de consommation d’aliments et de boissons (établissements sportifs couverts ou de plein air, les salles d’auditions, de conférences, de projection, de réunions, de spectacles ou à usages multiples, et les chapiteaux, tentes et structures et les transports au sein du territoire métropolitain et dans les Outre-mer). Seuls les salariés de ces établissements affectés à la vente d’aliments et de boissons pourront bénéficier des taux majorés au titre d’une fermeture administrative partielle. Les services de l’État seront particulièrement vigilants quant au respect de cette condition ».

Depuis le 1er janvier 2022, la collecte des contributions à la formation et de la taxe d’apprentissage a été transférée aux Urssaf.

Dans une actualité publiée sur son site Internet le 26 janvier dernier, l’Urssaf répond aux questions des employeurs les plus fréquentes sur le sujet.

Décalage de paie

« Pour les entreprises pratiquant le décalage de paie, les contributions de formation professionnelle et d’apprentissage sont rattachées à la période de l’activité du salarié. Pour ces entreprises :

  • les rémunérations liées à l’activité du mois de décembre 2021, versées en janvier 2022, sont à intégrer à la base de calcul de la contribution due pour l’année 2021, déclarée et payée auprès des Opco (ou de la DGFiP pour les versements de régularisation après le 1er mars 2022) hors DSN avec les modalités déclaratives de 2021 ;
  • les nouvelles modalités déclaratives établies dans le cadre du transfert du recouvrement à l’Urssaf s’appliquent à compter de la période d’activité de janvier 2022. Ainsi, la déclaration en DSN de la contribution due pour la période de janvier 2022 doit s’effectuer dès la DSN du mois principal déclaré de janvier 2022 ».

La contribution CPF-CDD en cas d’embauche en CDI

Les CDD qui se poursuivent par des CDI ne sont plus exonérés de la contribution CPF-CDD. « Les périodes d’emploi déclarées mensuellement pour un salarié en CDD ne sont pas à régulariser après un passage en CDI et ne donnent pas lieu à remboursement ou déduction ».

Taxe d’apprentissage

L’exonération de taxe d’apprentissage pour les entreprises occupant un ou plusieurs apprentis devient mensuelle. Les périodes d’emploi précédant l’embauche d’un apprenti ne sont donc pas à régulariser après la signature du contrat d’apprentissage et ne donnent pas lieu à remboursement ou déduction.

TVA

« Aucune TVA n’est due sur les contributions de formation professionnelle (CFP, CPF-CDD) et sur la taxe d’apprentissage (part principale, solde et CSA) ».

Contributions conventionnelles

Le transfert, au 1er janvier 2022, de la collecte des contributions à la formation et de la taxe d’apprentissage aux Urssaf ne concerne que les contributions légales de formation professionnelle. Les versements volontaires de formation professionnelle continuent donc à être collectés par les Opco.

« À compter du 1er janvier 2024, le recouvrement des contributions conventionnelles de formation professionnelle et de dialogue social pourra être transféré aux Urssaf, sur option des branches professionnelles concernées ».